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Red Bull AOM à Matera : Choc des cultures, responsabilité des organisateurs et des traceurs
Écrit par Fédération de Parkour   
Mardi, 17 Décembre 2019 14:58

Le 5 octobre 2019 a eu lieu le Red Bull Art of Motion 2019 en Italie, dans le charmant village historique de Matéra. Au programme de cet évènement organisé par une marque de boisson énergisante très connue : du Parkour, du Freerun ... et un incident qui fâche : le site de Matera, inscrit au patrimoine mondial de l’Unesco, est dégradé par les centaines de spectateurs et les entrainements de certains pratiquants en visite pour l'évènement. La Fondation Sassi, qui protège le patrimoine local, proteste et met en cause l'organisateur et la ville. La communauté de traceurs locaux MUVT ASD de Matera, qui jusque là avait de très bon rapports avec la ville, est prise à partie.

La situation est ironique car 4 mois plus tôt avait lieu un autre évènement ADD/Parkour dans le cadre de Open Playful Spaces, durant lequel MUVT ASD ont convié ADD Umbria pour un workshop ADD (vidéo) dans le même quartier. La ville de Matera avait d'ailleurs félicité l'excellent déroulement et le respect du patrimoine local. A présent, MUVT ASD voit ses bons rapports avec la ville remis en cause et exprime son indignation envers les organisateurs dans une lettre ouverte. Le 10 Octobre, Simone Bicorgna, président ADD Umbria, interpelle également dans un post Facebook qui fait le buzz dans la communauté. Il y dénonce les accidents avant et après l’évènement, les protections et matelas camouflés, les canettes de boisson bues ostentatoirement face caméra, ainsi que l’agression d’un journaliste local, la protestation des locaux et l’absence de service pour canaliser les trainings en marge de l’évènement. Il s’interroge enfin si, au delà des retombées commerciales évidentes pour la marque, quel impact cela aura-t-il sur la communauté de pratiquants et les habitants de Matera et qui paiera les tuiles cassées ?


L'analyse par Aurélien B, coach Parkour et consultant à la FPK :

Tout pratiquant de parkour/freerunning/add s'est retrouvé, au moins une fois, face à l’incompréhension du public le voyant bouger sur des espaces non prévus pour. Pas un seul traceur n’a pas vécu au moins une fois ce sentiment d’injustice d’être accusé pour rien, et de ne rien faire de mal. On bouge juste, on s’amuse, on ne dégrade pas, on ne dérange pas. Mais est-ce vrai ? Ne dérange-on pas ? Ne dégradons nous pas ? Pas sûr...

L’actualité nous le rappelle avec les derniers Red Bull Art of Motion en Italie, sur le site de Matéra : En marge de la compétition organisée par une célèbre marque de boisson énergisante, plusieurs éléments ont amené la fondation Sassi, en charge de la valorisation et la protection du patrimoine de Matera à se plaindre des « carences de l’organisation », de « l’absence d’un service de sécurité adéquat » et du laisser faire des autorités en voyant la ville envahie pendant plusieurs jours par des pratiquants du monde entier. Des quotidiens italiens ont fait remonter des dégradations aux bâtiments et des nuisances aux habitants (La Gazzetta Del Mezzogiorno, La Republicca, Sassilive, Il Fatto Quotidiano). Un attaché de presse s'est même fait bousculer par de jeunes traceurs en visite après leur avoir demandé de descendre d'un toit sensible.

L’évènement n’a donc pas fait consensus : s’il a fait le bonheur des traceurs/freerunners étrangers en visite, il semble laisser une bien mauvaise presse aux associations locales (ADD Umbria notamment qui a œuvré à Matera dernièrement).

Alors, responsabilité individuelle ou collective des pratiquants ?

On peut déplorer la pertinence du choix du lieu de la part de Redbull. Pour autant, il ne faut pas dédouaner les pratiquants qui s’y sont rendus en tant que participants ou spectateurs et qui ont une part de cette responsabilité.

Un évènement comme celui-ci met le projecteur sur un nouveau "parkour paradise", que ce soi par l'organisateur de l'évènement ou par les vidéos youtube des traceurs réputés qui donnent envie d'aller bouger sur un nouveau spot mythique. S'il n'était jusque ici fréquenté que par les associations locales qui s'y entrainent de manière respectueuse et en bonne entente avec l'habitant, il entrainera une certaine forme de tourisme du parkour. Et l'endroit devient alors un lieu qu’il faut absolument visiter pour aller s’éclater, à l’image de Santorini, mis en valeur par les Red Bull AOM. Le lieu verra d'abord quelques grandes teams et autres célébrités youtube et petit à petit des centaines de pratiquants qui l'auront ajouté à leur destinations de vacances. Des centaines de personnes, des milliers de sauts, des "classiques" répétés, autant d'utilisation d'une architecture pas forcément prévue pour.

« Moi, je fais attention »

Oui, moi aussi. Il n’empêche qu’en plusieurs années de pratiques attentive, il m’est quand même arrivé de desceller des briques, de laisser des traces malgré mes précautions, de casser des éléments déjà fragilisés et de déranger des riverains (bruit, vibrations). Faire attention ne veut pas dire qu'on ne laisse pas de trace. Et malheureusement, il y a ceux qui font moins attention. Dans l’émulation de l’évènement, à distance de « chez soi », ça n’a pas l’air si grave. On peut faire une entorse à ses valeurs. Et on oublie les retombées possibles .... A Matéra, le site est classé mais aussi dégradé. Le calcaire utilisé, du tuf, est une pierre friable sensible aux éléments, moins résistante que le granit, ou le béton. Ces pierres ont durement résisté au temps. Et les traceurs locaux, conscient de la fragilité du lieu, y pratiquent avec parcimonie et en redoublant de protection. Mais si le parkour « de masse » s’ajoute à l’usure du temps, c'est une autre histoire.

Ce n’est pas évident, mais il faut savoir mettre son envie ou son ego de coté par moment. Les "spots" ne sont pas ce qui manquent dans le monde. Il y a de nombreux lieux à explorer, certains moins sensibles que d’autres. Le sentiment d’injustice et d’incompréhension face à l'interdiction de pratiquer dans un lieu mythique est compréhensible. Mais il ne devrait jamais justifier une pratique non-respectueuse des lieux.

« Le droit des autres est une concession faite par notre sentiment de puissance au sentiment de puissance de ces autres » Nietzsche


Les recommandations de la FPK :

  • Aux pratiquants : Vous êtes ambassadeur de la pratique, où que vous soyez.

Renseignez-vous sur les lieux avant de pratiquer loin de chez vous. Tracez en harmonie avec l'environnement et avec respect pour les gens qui habitent sur place. Contactez toujours les pratiquants locaux : ils connaissent les lieux et savent ce qui est toléré. Réfléchissez à vos actions et à leur conséquences sur le patrimoine d'un coté et les arts du mouvement de l'autre. Et acceptez de ne pas pratiquer là ou on vous le déconseille. N'oubliez pas qu'après votre départ, votre réputation reste et déteint sur les traceurs locaux. Autant que ce soit en bien.

  • Aux organisateurs d'évènement : Réfléchissez à l'impact avant/pendant/après votre évènement

Faire un petit training avec une dizaine d'amis n'a pas le même impact sur un lieu qu'attirer des milliers de spectateurs et des pratiquants aux capacités hors-norme pour un évènement compétitif. Les effets de bords sont nombreux et perdurent une fois le matériel rangé, les tribunes démontées, et la vidéo en post-prod. Si la règle "leave no trace" est chère à la FPK, c'est aussi afin s'assurer que l'évènement sera accueilli favorablement l'année suivante. La FPK recommande de toujours contacter les associations de Parkour ou d'Art du Déplacement locales afin d'établir un dialogue et de voir comment canaliser les possibles débordements. Vous endossez une responsabilité envers le patrimoine local, envers l'image de la pratique au sens large, envers les associations existantes et les habitants.

  • Aux sélectionneurs d'athlètes : quelle image souhaitez-vous mettre en avant ?

Il est d'usage que le "potentiel de buzz" (comprenez le nombre de like sur youtube ou instagram) soit un élément pris en compte lors du recrutement d'un athlète. Il vous appartient toutefois de sélectionner avec discernement. S'il est bon de mettre en avant des performances athlétiques, cela doit toujours se faire dans un cadre respectueux envers le patrimoine et les usagers du lieux et en évitant de glorifier la prise de risque inconsidérée, surtout envers un public non-averti. Si dans le palmares vidéo de vos athlètes, vous les voyez p.ex. sauter sur des toits de voitures, vous cautionnez ce message et y associerez votre marque. Faites la part des choses.

 

Ressources :

Les articles dans la presse locale faisant remonter les dégradations (Google traduction est ton ami) :

L’usure du site de Matera :

Mise à jour le Mercredi, 18 Décembre 2019 12:24
 

 

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